Un simple cliquetis, suivit d'un bip significatif et hop, la voiture était verrouillée. Garé sur le grand parking de l'hôpital, Ethan venait d'arriver sur son lieu de travail. Et quel lieu ! Il y passait le plus clair de son temps, supportant de moins en moins d'être seul dans son grand et vide appartement. Au moins, ici il avait le sentiment d'être utile et surtout il ne pensait à rien d'autre qu'à ses diagnostics et ses patients. Ses interventions lui demandaient de la concentration et il n'y avait pas de place pour les soucis et le train-train quotidien. Il se plongeait à corps perdu dans son boulot et ça n'était, d'après lui, pas plus mal ainsi. Bien sûr, il conservait une vie sociale, des amis, et tout qui allait avec ; mais il y a certaines blessures qui ont du mal à cicatriser et bien qu'appartenant au passé semblent impossible à apaiser et oublier.

Comme chaque matin, il passa le seuil des grandes portes vitrées de l'hôpital. Il s'avança jusqu'au comptoir du secrétariat, et salua l'hôtesse d'accueil et standardiste.
« Bonjour docteur Lowell !
- Bonjour Susie... Comment ça va ce matin ? » -demanda-t-il avec un ravissant sourire, qui sonnait tellement vrai. Il ne faisait pas partie de ces hommes aigris par les mésaventures de leur existences, cependant, il s'efforçait de laisser paraître de la bonne humeur en tout instant, comme si cette dernière pouvait le protéger d'un futur problème, ou encore lui épargner les maux de ce monde. Et puis relativiser appartenait à ses traits de caractère. Il ne se laissait pas aller. Du moins il ne le faisait plus...

FLASH BACK
L'appartement était dans un état lamentable... Les fringues trainaient un peu de partout, sur la table basse se retrouvaient bouteilles de bières et autres cartons à pizza, et sur le divan était vautré un homme. Enfin ce qu'il en restait : Ethan. Endormi entre une montagne de cousins, une clope encore intacte coincée entre les lèvres, on pouvait facilement deviné que l'alcool l'avait poussé dans les bras de Morphée avant même qu'il ai pu allumer le fin rouleau de papier garni de tabac. C'est seulement lorsque le téléphone fixe sonna qu'il se mit à bouger. Grognant légèrement, et même étant à deux doigts d'insulter l'appareil, il laissa ce dernier sonner dans le vide. Ethan finit par se retourner, et brisa alors la cigarette.
« Et merde... Pfff ! » -parvint-il à dire, tout en grimaçant. Il se redressa, se frotta la nuque et jeta le reste de cigarette sur la table. Le répondeur s'enclencha et on pu alors entendre la voix d'un de ses amis résonner dans l'appartement, et en puissance 10 dans la tête d'Ethan.
« Hey mec ! Qu'est-ce que tu fous sérieux ?! On t'a pas vu depuis une semaine... Ca va ? On s'inquiète. Donne de tes nouvelles. Sans blague, Alizée va passer chez toi si ça continue comme ça. Rappel-moi. Bye. »
Ethan leva les yeux au ciel, et s'avança vers le répondeur.
« Message effacé. » -annonça une voix robotique.
FIN FLASH BACK

« Docteur ? Ouhouh !
- Euh... Désolé... Vous disiez ?
- J'ai fait parvenir votre courrier au service de cardiologie...
- Oh ! Merci...! » Il accompagna ses mots de remerciements d'un simple sourire, puis se dirigea vers l'ascenseur. Là, il pu s'y engouffrer. Jetant un coup d'oeil à l'énorme horloge accroché au-dessus du comptoir de la réception avant que les lourdes portes de l'ascenseur se referme, il constata qu'il était à l'heure. Comme d'habitude ! Et son service commençant avec un léger temps de décalage volontaire, il se retrouvait seul dans la cabine. Il n'y avait pas foule, bien que le hall grouillait de patients, et d'employés en tout genre. Il appuya sur le bouton du 3 ème étage et s'entama alors son ascension quotidienne jusqu'à son service. Sauf qu'à peine arrivé au premier, la cabine se stoppa et les portes s'ouvrir sur... elle.

« Jaycee… Ouhouh, Jaycee… Réveille-toi… »

Avachie sur la table en bois de la salle de repos, la jeune infirmière se redressa brusquement, réveillée en sursaut par la voix tonitruante de sa collègue, n’appréciant visiblement pas que Jaycee s’endorme en plein milieux de ses heures de boulot. Dissimulant un bâillement derrière sa main plaquée sur sa bouche, la jeune femme mis plusieurs secondes à reprendre ses esprits. Bon dieu, qu’est-ce qu’elle était fatiguée ! Normal en même temps, acceptant de remplacer une de ses collègues de nuit, alors que la jolie blondinette travaillait d’ordinaire le jour, il était logique qu’à 6h du matin, après déjà dix heures de bons et loyaux services pour le St John Hospital, la petite ne tenait plus le coup ! Dans un soupire, elle jeta un coup d’œil à sa montre, apprenant alors qu’il lui restait encore deux heures à tenir afin de pouvoir enfin quitter le service, remonter dans sa voiture, rentrer chez elle et s’enrouler dans sa couette, et enfin, dormir.. Dormir… Que cette idée était alléchante… et si… allez, on referme les yeux et…

« Bon Jay’, lève ton cul de cette chaise, et va voir la p’tite Amy qui sonne. Je crois que sa perf’ est terminée, faut la changer. Allez bouuuuge ! »

Dans un grognement très féminin, la jolie blondinette du prendre son courage à deux mains pour ouvrir ses paupières qui venaient de se refermer. La vie était dure… Mais Jenny avait raison, elle devait aller changer la perfusion de la petite Amy… Alors, Jay se leva. Non sans mal, certes, mais elle se leva et traina les pieds jusqu’au poste infirmier où elle entreprit de préparer le pochon de perfusion qu’elle alla ensuite mettre en place auprès de sa patiente, coupant ainsi le signal sonore… La petite dormait à poings fermés, nullement réveillée par les bip-bip stridents de sa machine qui avait prévenu l’infirmière que la totalité de la perfusion était terminée. Elle referma la porte derrière elle, et vit, au bout du couloir, assis par terre, le pouce dans la bouche, un petit garçon d’à peine cinq ans. Fronçant les sourcils, elle s’approcha de lui, et s’accroupi pour être à ça hauteur.

« Hé bien jeune homme, que fais-tu ici… ? Tu devrais être dans ton lit…
- Mais j’arrive pas à dormir… j’ai perdu scoubibi…
- Oh mince, alors il va falloir le retrouver, allez viens… »

Et d’un geste tendre, Jaycee attrapa la main du petit Tim et l'entraîna dans sa chambre. Pendant plus de dix minutes, infirmière et patient se lancèrent alors à la recherche du doudou perdu… Dans la table de nuit, sous le lit, derrière l’armoire, dans l’armoire, dans la salle de bain… Puis finalement, c’est en soulevant les draps, que le petit retrouva sa peluche, cachée tout au fond de son lit. La jeune Carter resta à son chevet jusqu’à ce qu’il s’endorme, puis quitta la chambre. Elle comptait les heures et les minutes qu’il lui restait, afin d’enfin s’en aller. Mais le temps semblait passer à une vitesse… déconcertante. Quand la jeune femme revint dans la salle de repos… elle grinça des dents. Sa collègue était avachie sur le canapé et ronflait bruyamment ! Quel toupet ! Dormir pendant les heures de travail ! Non mais vraiment ! Alors Jay ne se priva aucunement pour la réveiller… en douceur… Enfin, presque…

Elle ressentit un énorme soulagement lorsqu’elle entendit la voix d’une des filles de l’équipe du matin qui approchait dans le couloir. Il était presque 8h, il ne leur restait plus qu’à transmettre à la relève tout ce qui s’était passé pendant cette longue nuit, et s’en aller. Et elle avait hâte ! Mais encore une fois, les minutes lui semblèrent longues, et les transmissions durèrent plus de temps que prévu… Quand enfin la torture s’acheva, il était 8h passée et… et une de ses collègue du jour lui demanda si elle pouvait apporter des papiers dans le service de chirurgie plastique avant de s’en aller. Et bien sûr… Jaycee accepta. Alors, papiers dans la main, la jeune femme appuya sur le bouton de l’ascenseur. Elle portait encore sa tenue violette de travail, pressée d’en finir avec sa mission pour ensuite se changer et rentrer chez elle. Les portes s’ouvrirent quelques secondes plus tard… sur lui.

« Salut … » lança t-elle d’une petite voix, gênée de tomber sur lui.

Elle devait certainement avoir une sale tête, sa tête des mauvais jours, celle qui n’avait pas dormi de la nuit, et ses cheveux relevés en une queue de cheval datant de la veille au soir devaient certainement faire la tête. Mais à vrai dire, elle était bien loin de se préoccuper de tout ceci. Jay entra dans la cabine et appuya sur le bouton du 4ème étage. Les portes se refermèrent. Ils étaient seuls. L’ambiance était silencieuse, lourde, tendue. Aucun des deux ne parlait. Alors que l’ascenseur reprit sa montée, Jay jeta un léger coup d’œil aux papiers qu’elle transportait, plus pour feindre une quelconque occupation, et masquer qu’elle était mal à l’aise en présence d’Ethan. Mais soudain, la cabine se stoppa brutallement et les lumières s’éteignirent, les plongeant ainsi dans une semi-pénombre.

« Oh putain » ne pu s’empêcher de s’exclama Jaycee. « Il ne manquait plus que ça ! » gromella-t-elle en s’acharnant sur le bouton d’appel.

Jaycee était claustrophobe et très vite, elle allait se mettre à paniquer.

A son salut Ethan répondit par un simple hochement de la tête. Il était bien incapable de prononcer le moindre mot. Depuis qu'il l'avait croisé au détour d'un de ces longs couloirs blancs, il avait lutter pour paraître des plus normal, détaché et sûr de lui. Un véritable challenge puisque Jaycée avait toujours eu un certain effet sur lui. Il l'avait durant des années perçut comme la femme parfaite ; sa femme idéale... Jusqu'à ce qu'elle lui propose le divorce. Peut-être était-il encore intimement et inconsciemment convaincu qu'elle demeurait cette être si cher à son coeur. Au début, la première fois qu'il l'avait revu, il avait cru à une hallucination. Rares n'avaient pas été les fois où il avait cru l'apercevoir, alors qu'ils venaient tout juste de rompre et que le divorce n'allait pas tarder à être prononcé. Quelques années plus tard, c'était pourtant bel et bien le cas... Elle était revenue à Seattle, dans cet hôpital, et le blond lui allait à ravir. Les portes de l'ascenseur venaient de se refermer derrière elle, alors que la jeune infirmière pressait le bouton du 4ème étage. Chirurgie plastique...? Oh... Il ne posa cependant aucune question, la laissant avec son dossier.

Encore en tenue de « civil », Ethan ne bronchait pas. Il était légèrement avancé par rapport à elle dans cette cabine, et portait toute son attention sur le petit écran au-dessus de la porte qui leur indiquait le niveau auquel ils se trouvaient. Du moins, avant que l'appareil ne se stoppe soudainement, et que les lumières s'éteignent d'un seul coup. Jaycee en lâcha un juron, ce qui fit immédiatement réagir Ethan, toujours présent pour détendre à sa manière l'atmosphère.
« Toujours aussi polie... Mademoiselle Carter. » Ces derniers mots avaient toujours un petit goût amer dans sa bouche, alors qu'il les prononçait le plus naturellement du monde, sur ce ton amusé. Il se retourna, regarda l'écran de veille de l'ascenseur situé du côté de la miss, près des boutons. Gentiment, il lui retira sa main du bouton d'appel. Si elle le pétait, ils étaient dans de beaux draps... Déjà qu'ils étaient... dans la merde ? Ouais c'était ça ! Mais il ne devait pas l'exprimer aussi clairement, au risque de voir Jaycee paniquée. Sa mémoire la concernant était comme sans faille, et il se souvenait parfaitement de ce dont elle était capable niveau crises d'angoisse et de claustrophobie. Une voix finie par retentir dans l'habitacle de la cabine : la maintenance.

« Oui ? Pourquoi cette excitation sur le bouton d'appel d'urgence ?
- Euh... Bonjour... Désolé pour... « L'excitation ». -commença-t-il tout en lançant un regard à Jaycee. A vrai dire, l'ascenseur vient de s'arrêter. Nous sommes plongés dans le noir et...
- Une panne, ok. Un agent va venir réparer tout ça.
- Rapidement, hein ?
- Au plus vite... Soyez patient ! »
Et hop, plus un bruit. Ethan soupira, fin prêt à râler. Au plus vite ? Mais ça voulait dire quoi ça ?! Il allait se ramener dans 2 heures ?! Le médecin ne voulait pas se retourner et se retrouver face à Jaycee, sans doute toute pâle, fin prête à paniquer. Il ne le voulait pas, car il se connaissait. Il savait par avance qu'il allait avoir envie de la rassurer, comme avant. Qu'il allait chercher à l'apaiser, comme avant. Qu'il allait prendre soin d'elle, comme avant. Et ce « comme avant » n'avait plus de raison d'être. Ca n'était plus son rôle, ni même sa place. Il allait devoir lutter, et rester distant, tout ça pour lui-même se préserver. Ce divorce avait été d'un commun accord, cependant, il l'avait quelque peu forcé de son côté. Si elle avait jugé qu'il était préférable pour eux de se séparer, il l'avait écouté. En pensait-il autant ? Pas sûr.

Mais Ethan n'allait pas lui tourner le dos indéfiniment. Prenant sur lui, il finit par lui faire face. La pénombre l'aidait, et il s'efforçait à ne pas deviner les traits inquiets de son visage d'ange. Que pouvait-il dire ? Que tout allait bien se passer ? Ils étaient coincé dans un ascenseur ! Tiens, ça lui apprendra à ne pas prendre les escaliers ! Là, au moins, il était sûr qu'il ne se retrouverait pas suspendu dans le vide ! Se doutant que ça n'allait pas être réglé en quelques minutes, le jeune homme prit appuis contre la parois de l'ascenseur et s'y laissa glisser, s'asseyant par terre. Ainsi, pas besoin de parler, la blondinette allait sans doute comprendre d'elle-même qu'il ne fallait pas compter sur l'efficacité des agents de maintenance de cet hôpital. Il se souvenait de sa collègue, au dernier réveillon de noël, qui était malencontreusement restée bloquée aux archives, le pass ne fonctionnant plus. La pauvre y avait passé quatre longues et interminables heures, et à la fin elle avait tenté de faire du forcing en trafiquant l'espèce de serrure avec une épingle à cheveux ! Il aurait toujours pu demandé une barrette à Jaycee, mais pour un ascenseur, ça allait être une démarche assez délicate. Il fallait une sacrée barrette !

A peine quelques secondes étaient passées depuis que la secousse s’était fait ressentir, laissant la cabine de l’ascenseur et ses occupants suspendus dans le vide, à mi-chemin entre deux étages, et déjà, la respiration de Jaycee s’était quelque peu accélérée. Les mouvements de sa cage thoracique se faisaient plus amples, plus lents aussi, afin de permettre à tout l’oxygène dont elle avait besoin d’entrer dans ses poumons et d’y faire son boulot. Il fallait qu’elle respire, qu’elle prenne sur elle pour ne pas paniquer. Elle ne répondit pas au sarcasme lancé par Ethan, mais le fusilla tout de même du regard, n’appréciant que modérément le fait qu’il l’appelle ainsi par son nom de jeune fille, lui rappelant alors qu’elle ne portait désormais plus, et ce depuis presque un an, le sien. Pendant peu de temps, elle avait été madame Lowell, mais tout ceci n’avait plus lieu d’être et, même si elle s’était persuadée et convaincu au fil du temps que s’en était mieux ainsi, elle ne pouvait s’empêcher de regretter cette époque désormais révolue, où tous les deux, bien plus qu’heureux, filaient le parfait amour… Et même si le docteur Lowell avait prit un ton amusé, tentant de détendre l’atmosphère dans la cabine, Jay elle, estimait qu’il n’était nullement l’heure de faire des plaisanteries : l’heure était grave ! Est-ce qu’elle rêvait ou elle, claustrophobe, venait de se retrouver coincée dans un ascenseur… alors qu’elle devrait déjà se trouver dans sa voiture à l’heure qu’il est, roulant vers son appartement afin d’y savourer une douce journée de sommeil bien méritée ? Mais alors le clou du spectacle, la cerise sur le gâteau comme on dit, c’était qu’elle était enfermée avec Ethan ! Non sérieusement, monsieur le Dieu, si par pur hasard vous exister, ce dont Jaycee doutait énormément, sachez que vous êtes vraiment un bel enfoiré. Et puis c’est d’un cliché, sérieux !

Avant qu’elle ne réduise à néant le bouton du signal d’alarme, et donc leur seule chance de prévenir qu’ils étaient bloqués dans l’ascenseur, Ethan prit la main de son ex-femme pour la retirer du bouton. Il semblait si calme, si serein, et tout ceci ne rassura en rien Jay’, qui elle, commençait sérieusement à se sentir mal, manquant d’air. Surtout que personne ne semblait répondre à son putain d’appel au secours ! Vexée par le fait qu’il la mette à l’écart, ne prenant aucunement conscience que c’était pour leur bien respectif, Jaycee se recula et s’adossa au mur, laissant tomber sa tête en arrière. Elle ferma les yeux, se concentrant sur sa respiration, comme le lui avait appris un psychologue qu’elle avait consulté étant gamine lorsque ses parents, et plus particulièrement son père, avaient découvert son angoisse du confinement. Mais en entendant la voix qui sortit du haut-parleur, elle rouvrit brusquement les yeux, sans pour autant bouger de place, et écouta avec attention les mots du mec de la maintenance… Miséricorde. Pourquoi avait-elle accepté de porter ces papiers au 4ème étage, hein ? Trop bonne trop conne…
Le jeune docteur se retourna, l’observa quelques secondes, mais elle préféra refermer les yeux, reprenant son exercice de respiration… Ils allaient croupirent ici ! Elle l’entendit, à quelques mètres d’elle se laisser glisser jusqu’au sol et le regarda. Il semblait tout aussi gêné qu’elle de se retrouver enfermer en sa présence, même si il prenait sur lui pour tenter de le dissimuler. Mais elle le connaissait trop par cœur, et avec elle, sa fierté tombait des nues. Lentement, la jeune femme finie par se laisser glisser à son tour contre le mur, s’asseyant au sol dans une position de repli, les genoux contre sa poitrine. Le silence lui pesait, elle qui avait tant envie de dormir il y a encore quelques minutes, là, elle semblait être parfaitement réveillée… Elle avait du mal à se concentrer sur l’air qui entrait et sortait de ses poumons, elle vint entourer ses genoux de ses bras et referma les yeux, encore, ne supportant déjà plus les couleurs tamisées de la cabine.

« Ethan… » Souffla-t-elle doucement. « Il va falloir que tu parle, sinon, je vais paniquer, et… tu sais comment je peux m’avérer assez effrayante dans ce genre de moment… Alors si tu reste muré dans ton silence, ça ne va pas arranger les choses… »

Elle marqua une légère pause. Elle n’avait pas bougé d’un poil, les yeux toujours fermés, préférant de loin le noir complet plutôt que la semi-pénombre. Jay ignorait encore combien de temps est-ce qu’ils allait passer dans cet endroit, mais elle espérait que l’hôpital ferait rapidement le nécessaire pour les sortir de là, car si pour le moment, elle parvenait à contenir assez bien son angoisse, elle avait bien peur de ne pas être capable de tenir très longtemps.

« Je n’irai pas jusqu’à te demander de me prendre dans tes bras, rassure toi, mais… dis au moins quelque chose… ce que tu veux… » reprit-elle, alors qu’il n’avait pas encore répondu à sa requête.

Ethan, le mec toujours bien dans ses baskets, pour qui tout va bien, et cela en toute circonstances d'après les apparences de cette dernière année. Copines, sorties, amis, boulot, passion, distraction et tout le reste... C'était au beau fixe, il ne se plaignait pas. Jamais. Sauf quand il pleuvait, c'est tout. Et pourtant, il avait quelques démons. Des cauchemars et mauvais souvenirs qu'il gardait sous silence avec précautions.
Jaycee aussi s'était assise, et il la sentait mal. Il n'avait même pas besoin de l'observer pour deviner que ça n'était pas la grande joie. Ethan la savait claustrophobe, et il la connaissait par coeur. Doucement, elle allait céder à la panique. Et lui, il allait être dans un sacré pétrin ! Et puis être coincé dans cet ascenseur avec elle ne le mettait des plus à l'aise. Elle lui demandait de parler, afin de l'aider à retarder le moment où elle allait littéralement péter un câble. Mais que pouvait-il dire ? Prendre des ses nouvelles ? Du genre : Hey ! Comment ça va depuis que t'as fait tes valises et que t'as quitté notre appartement ? - Pfff ! Pathétique ! Il ne savait pas quoi dire, et c'était sans doute pour cela qui se terrait aussi dans ce semblant de silence. Maladroit, il allait être capable de dire quelque chose de travers, qu'elle s'empresserait de mal interpréter.

« Je ne vois pas quoi dire à part que ça va aller.. -Il fit une courte pause et releva la tête vers elle. Tu te sens mieux ? J'en doute... » Sa voix était posée, calme, loin de paraître agressive ou déplacée. On voyait bien qu'Ethan était des plus détendu, et que seul la présence en soit de la jolie blonde pouvait le déstabiliser. Pour lui cette panne n'était qu'une légère vague dans sa journée. Il allait très vite s'en remettre ! Elle, c'était moins sûr. Il entendait se respiration ralentir, ses inspirations se faire plus grandes et profondes... Ce fut comme plus fort que lui, Ethan laissa à nouveau le silence s'installer entre eux. Il luttait contre lui-même, contre ses souvenirs qui revenaient à la charge et l'attaquait à violence, dans le seul espoir de lui rappeler un temps où Jay avait fait son bonheur. Ces même souvenirs lui mettait sous le nez l'attitude qu'il adoptait à son égard, la traitant comme une inconnue, une infirmière lambda. Certes ils échangeaient quelques sourires, quelques mots... Mais ces derniers se voulaient rares et exceptionnels. Alors maintenant, dans cette cabine d'ascenseur, il se voyait mal engager une conversation. Du moins une qui tiendrait la route !

« T'allais au 4ème pour quoi faire ? -demanda-t-il, par simple curiosité. Bah quoi ? Tu m'as demandé de parler... » Pas faux ! Il fallait savoir ce qu'elle voulait la miss ! Quitte à papoter, autant qu'il apprenne des choses ! Il la détailla, remarquant à quel point elle était mal. Recroquevillée sur elle-même, les yeux clos, concentrée sur l'air qui entrait et sortait irrégulièrement de ses poumons. « Hey ! Regarde-moi... -Il attendit sagement qu'elle s'exécute, lui laissant alors tout le temps nécessaire pour prendre sur elle et le faire. Puis il esquissa un léger sourire, qu'il espérait rassurant. Ca va aller, ok ? Détend-toi Jay...cee. » Il venait de se rattraper. Plus de surnom entre eux, et cela depuis un baille. En fait, il avait tout perdu la concernant...